Sur Internet, faut-il demander à ses concurrents la permission de les concurrencer ? A en croire certains acteurs de la presse traditionnelle, oui. Petit résumé des faits. Depuis le mois de juin 2012, le groupe CCM Benchmark a décidé de repositionner le site Linternaute.com, en investissant massivement dans une nouvelle maquette, la production de contenus d’actualité originaux par une équipe dédiée et la création d’un JT quotidien, le 99 secondes, diffusé sur la homepage de notre site. En à peine quelques mois, nous avons réussi à attirer sur notre site des centaines de milliers de nouveaux visiteurs à la recherche d’informations différentes de ce qu’ils peuvent trouver ailleurs. Au passage, le taux de rebond sur notre homepage a baissé de quasiment 15 points.
En septembre nous avons tout naturellement demandé à Médiamétrie de prendre en compte ce repositionnement. Pour apparaître dans la catégorie des sites d’actualité, puisque c’est désormais notre ADN. Médiamétrie a étudié notre dossier et a accepté notre changement de catégorie. C’est donc bien que nous respections l’ensemble des règles de l’institut. Le changement a donc été opéré et est déjà paru aux Etats-Unis, dans l’interface NetRatings dont les clients américains peuvent découvrir notre classement dans la catégorie actualité.
Mais aujourd’hui, plusieurs groupes de presse contestent notre position. Parmi eux, aucun pure-player, aucune chaîne de télévision, aucune radio : seulement 8 éditeurs de presse papier. A eux seuls, ils représentent 69% de l’audience de la catégorie actualité en septembre 2012. Seulement.
Et que nous reprochent-ils ? Ils auraient aimé une «concertation préalable» avant que Médiamétrie n’accepte notre changement de catégorie. C’est donc à nos concurrents que nous aurions dû demander l’autorisation – en nous excusant sans doute – de les concurrencer. Cela rappellera d'anciennes batailles dans le classement radio. A l’époque, la décision – de justice – avait été claire : ce n’est pas à un groupe de dire si un autre groupe peut «apparaître comme un concurrent». Quelle que soit la commission qui en juge. L’actualité n’est pas le monopole de la presse traditionnelle.
Alors, vont-ils nous expliquer, puisque nous respectons les règles, changeons les règles ! Les portails Internet n’ont jamais pu compter l’ensemble de leur audience d’actualité dans cette catégorie et demain c’est aux sites basés sur de la vidéo qu’on expliquera que la vidéo ce n’est pas vraiment de l’actualité. On trouvera encore d’autres reproches à l’Internaute, il est trop comme ceci et ceux qui le font ne sont pas assez comme cela. Le fond du débat, c’est de savoir si oui ou non, sur l’Internet français des entreprises d’avenir ont encore le droit de faire concurrence aux groupes de presse.
Alain Steinmann, directeur CCM Benchmark
