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«Premier bilan parfaitement partial de la vidéo sur Internet», par Bertrand Beaudichon

«Premier bilan parfaitement partial de la vidéo sur Internet», par Bertrand Beaudichon

Dans une tribune publiée par le Huffington Post, Bertrand Beaudichon, vice-président de l’Udecam et vice-président d’Omnicom Media Group et membre du jury Média aux Cannes Lions, dresse un bilan nuancé des premières expériences de la publicité sur vidéo en comparant les apports spécifiques d'Internet et de la télévision.

«Premier bilan parfaitement partial de la vidéo sur Internet».
Soyons clairs, le marché de la publicité en ligne est maintenu en croissance grâce à la vidéo «on line» : catch-up, in-stream, out-stream. Sans son recours de plus en plus important comme complément aux plans TV classiques, la croissance du marché du display, souffrant de plus en plus en termes de performances, aurait sans doute marqué le pas, après plusieurs années de croissance à deux chiffres.
Il est temps de faire un point sur les enseignements qu'on a pu tirer de nos premières expériences avec ce nouveau media. Ils sont selon moi au nombre de 4 :
– L'efficacité de la catch-up TV est indéniable, car elle est portée par son usage. Les consommateurs français la consomment de plus en plus. Et là, pas de miracle : les meilleures audiences sur la catch-up sont obtenues sur les programmes qui ont les meilleures audiences en live : séries, reportages, JT… La publicité diffusée avant les programmes en catch-up TV est mieux mémorisée qu'un espace classique, parce-que le tv-naute vient activement chercher le programme qu'il souhaite regarder. Mais la catch-up présente deux limites pour pouvoir être massivement utilisée dans les plans des annonceurs : D'une part, elle est encore trop rare en termes d'inventaires disponibles. De plus, les chaînes, protégeant la valeur de leur inventaire, souhaitent valoriser la mémorisation supplémentaire dont elle bénéficie. Les espaces en catch-up restent donc chers par rapport à ceux de la TV classique. D’autre part, toutes les régies ne se sont pas dotées des mêmes moyens de tracking que les espaces publicitaires sur Internet classiques. Et, dans la jungle du digital, pas de tracking, pas de mesures de performances, égal pas d'investissements.
– Plus il y a d'écrans, et plus on les consomme. La vidéo n'a pas généré son audience au détriment du media TV traditionnel. Au contraire, les audiences TV n'ont jamais été aussi fortes, et ce, dans toutes les catégories socio-démographiques. La vidéo hors catch-up est de loin la première chose que consomment les internautes quand ils surfent, et les meilleurs programmes TV gagnent près d'un tiers d'audience supplémentaire grâce à leur diffusion en catch-up. Il y a donc une réelle opportunité à compléter les plans medias TV par des plans vidéo puissants et correctement mesurés. Il est donc logique que la plupart des annonceurs, et surtout les plus réticents au media digital, aient vu la part du vidéo display augmenter significativement dans leur mix media.
– La vidéo sur Internet a fait exploser la frontière jusque-là bien trop étanche entre les données des medias traditionnels et celles des medias digitaux. Avant, on avait d'un côté, les données de l'audience, et de l'autre, celles du contact et de la performance. Les deux ne discutaient pas. Cerveau droit vs cerveau gauche. Mais maintenant que le web devient media audiovisuel, tout est différent : pour peu qu'on n'additionne pas des choux et des carottes, des GRP digitaux et des GRP classiques, l'efficacité d'un plan TV + vidéo sur Internet peut être mesurée. Le problème, c'est d'abord de bien définir le GRP digital. Et ce travail reste à faire, sous l'initiative récente de Médiamétrie et du CESP, et de quelques agences medias qui, faute de Loi marché encore émise, ont souhaité avancer seules avant de procéder à des additions douteuses.
Mais la définition robuste d'un GRP digital comparable à celui de la TV ne lèvera pas un problème évident : tant que l'audience Internet et l'audience TV ne seront pas relevées à partir d'un panel unique, le risque d'additionner des choux et des carottes demeurera plein et entier. Qu'à cela ne tienne ! Google et Médiamétrie testent actuellement en France le premier panel single source TV + Web + mobile.
– A l'usage, il apparait que l'efficacité réelle de la vidéo out-stream en termes de rapport coût/couverture additionnelle a été largement surestimée, parce-que fondée des données erronées : une vidéo affichée sur un écran équivaudrait à une vidéo vue entièrement ; la couverture sur cible est calculée pour les réseaux vidéo comme si la publicité avait été diffusée sur l'ensemble du réseau du diffuseur.
Corrigée de ces deux éléments, la vidéo out-stream reste efficace, mais beaucoup moins qu'annoncé, et n'est réellement productive par rapport à la TV que sur les cibles les moins consommatrices de TV, notamment sur les plus jeunes.
Aux agences medias d'intégrer ces deux biais dans leur façon de négocier les espaces en question, et d'intégrer systématiquement les outils mesurant l'exposition réelle. Car sur certaines cibles, la TV classique peut se révéler plus productive !

L'univers des media a, sous l'avènement du digital, considérablement accéléré le rythme de sa transformation. Et l'exemple de la vidéo sur Internet confirme bien la nouvelle règle de ce marché : l'important n'est pas d'avoir la bonne solution tout de suite. L'important, c'est de tester, de mesurer, de rectifier, avant de refaire. La vidéo sur Internet a un grand avenir, et va prendre une part majeure du marché publicitaire sur l'Internet, fixe ou mobile. Soyons lucides et honnêtes sur ce qu'elle apporte, comme sur les promesses qu'elle n'a pas tenues. Quand toutes les télévisions seront connectées, il sera trop tard !

Bertrand Beaudichon, vice-président de l’Udecam et vice-président d’Omnicom Media Group

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